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1688

Jean-François Regnard, Le Divorce

Paris : Vve Duchesne et fils, 1790

Jupiter spectateur

Alors qu'Arlequin vient d'annoncer au public l'annulation de la représentation, Jupiter descend des cieux pour assister à cette comédie nouvelle:

JUPITER.
Je descends exprès des cieux pour voir une répétition de la pièce nouvelle qu'il y a si longtemps que tu promets. On dit que l'on y sépare un mari d'avec sa femme ;et comme Junon est une carogne qui me fait enrager, je pourrai bien en faire venir la mode là-haut.

ARLEQUIN.
Mais, Monsieur Jupiter, quelle apparence ? Nous ne la savons pas encore :il va venir un débordement de sifflets de tous les diables.

JUPITER.
Ne te mets pas en peine ; j'ai fait provision de quantité de foudres de poche ;et le premier siffleur qui branlera, par la mort ! Je lui brûlerai la moustache.

ARLEQUIN.
Oh ! Tout doucement, Monsieur Jupiter ;ne choquons point le parterre, s'il vous plaît ;nous en avons besoin: cela ne se gouverne pas comme votre tête.

Au parterre.
Messieurs, puisque Jupiter l'ordonne, et que d'ailleurs... l'occasion... de la faveur... votre bonté... votre argent... qu'on a de la peine à rendre ; ... vous voyez bien, messieurs, que nous vous allons donner Le Divorce.

JUPITER.
Je vais me placer aux troisièmes loges pour mieux voir.

ARLEQUIN.
Ah ! Monsieur Jupiter, un gentilhomme comme vous aux troisièmes loges ?

JUPITER.
Je me suis amusé, en venant, à jouer à la boule aux petits-carreaux, contre quatre procureurs qui ne m'ont laissé que trente sous.

ARLEQUIN.
Où diable vous êtes-vous fourré là ? Ces messieurs-là savent aussi bien rouler le bois que ruiner une famille.

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