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ca. 1652

Jean-Louis Guez de Balzac, Les Entretiens de feu Monsieur de Balzac

Paris : A. Courbe, 1657.

Scaliger joue la comédie dans ses écrits

Jules-César Scaliger fait usage d’une épithète particulièrement fleurie pour décrire Érasme de Rotterdam : Guez de Balzac l’explique comme d'une métaphore rendant compte de la « théâtralité » dont il fait preuve.

Quand il [Jules-César Scaliger] dit enfin Erasmus parricida et, ne se contentant pas de parricida, quand il fait tout exprès un mot nouveau pour Érasme et qu’il l’appelle triparricida, ne vous semble-t-il pas alors qu’Érasme a pour le moins tué son père et sa mère, qu’il est quelque chose de plus que criminel de lèse-majesté divine et humaine ? Tout cela vous vient d’abord à l’esprit, sans pourtant rien croire de tout cela. Et vous ne vous imaginez pas qu’Érasme soit un Busiris, soit un monstre, soit une Furie, mais oui bien que Scaliger est un exagérateur, est un déclamateur et un comédien. Quelque estime que vous ayez pour Scaliger, vous ne pouvez pas nier qu’en cet endroit-là, il ne joue le Don furioso et qu’il n’emploie des paroles tragiques en une affaire de néant. Ce qu’il faisait était proprement exciter des tempêtes dans un ruisseau, c’était tonner et foudroyer sur des marmousets. L’objet de la colère était encore moins considérable que celui-là, parce qu’il était faux et imaginaire ; il se formait des fantômes pour les combattre ; il faisait croire à Érasme qu’il avait offensé Cicéron ; à quoi le bon homme ne songea jamais.

Extrait de l'entretien XII : « Qu’il n’est pas honnête de se commettre contre toute sorte d’attaquant. Au même [Monsieur Chapelain, conseiller du roi en ses conseils] » disponible sur Gallica, p. 200-201.


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