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ca. 1653

Jean-Louis Guez de Balzac, Les Entretiens de feu Monsieur de Balzac

Paris : A. Courbe, 1657

Vivre avec son temps !

Dans un climat de débats autour du Virgile travesti de Scarron (publié dès 1648), Guez de Balzac donne cet entretien demeuré célèbre et qui inspira L’Art poétique de Boileau. Il y déplore l’utilisation fréquente que le style burlesque fait des archaïsmes.

Ne saurait-on rire en bon français et en style raisonnable ? Pour se réjouir, faut-il aller chercher un mauvais jargon dans la mémoire des choses passées et tâcher de remettre en usage des termes que l’usage a condamnés ? Est-il impossible de donner un spectacle aux sujets de Louis quatorzième à moins que de remuer un fantôme qui se représente le règne de François premier, à moins que d’évoquer l’âme de Clément Marot et de désenterrer une langue morte ? ou, ce que je trouve plus mauvais, à moins que de confondre les deux langues et, mêlant la vivante avec la morte, faire ce que faisait le tyran dont le poète dit : Mortua quin etiam jungebat corpora vivis. Il attachait les morts avec les vivants. [Virgile, Énéide VIII, v. 485] […] Avoir recours à Marot et au siècle de Marot pour plaire aux gens de ce siècle ici, c’est trop se défier de soi-même et ce n’est pas assez estimer son siècle. L’Antiquité ne doit pas être imitée par cet endroit-là. On aurait autant de raison de prendre les modes des habillements dans les vieilles tapisseries et de porter les restes de son trisaïeul. Il faudrait faire revenir les pourpoints à busc et les chausses à la Suisse ; il faudrait que les femmes fussent encore, comme elles étaient, toutes manches et toutes vertugadins.

Extrait de l'entretien XXXVIII : « Du style burlesque » disponible sur Gallica, p. 422-3.


Pour indiquer la provenance des citations : accompagner la référence de l’ouvrage cité de la mention « site Naissance de la critique dramatique »