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1656

Jean Loret, La Muse historique

Paris, Chénault, [1656-1665].

Création de Timocrate

La lettre du 16 décembre 1656 est l'une des toutes premières à accorder une couverture aussi massive à une comédie, en l'occurence, Timocrate de Thomas Corneille représenté au Théâtre du Marais.

Mardi dernier notre monarque,
Monsieur et maint seigneur de marque,
En grand train allèrent exprès
Aux comédiens du Marais,
Pour y voir jouer Timocrate,
Pièce touchante et délicate,
Qui charme fort le spectateur
Et qu’a faite un célèbre auteur
À savoir, le jeune Corneille,
Qui du théâtre est la merveille,
Depuis que son illustre aîné
A le théâtre abandonné,
Préférant aux sujets comiques
Les sujets saints et catholiques,
Où ce noble et sage Normand
Réussit admirablement.
Tout de bon, cette comédie
Fait estimer la Normandie,
Qui sait produire des esprits
D’un si rare et si digne prix.
Dans le temps qu’elle fut jouée,
Elle fut du roi fort louée
Témoignant tout visiblement
Qu’il y prenait contentement.
Et la troupe qui représente
La susdite pièce excellente
(Aussi bien actrices qu’acteurs)
Eut quantité d’approbateurs
Et, de plus, une bonne somme ;
Car j’ai su d’un fort honnête homme,
Qui dîna mercredi chez nous,
Que le Roi, qui paya pour tous
(Soit vérité, soit hyperboles),
Leur fit donner six-vingts pistoles.
J’ai su depuis et tout de bon
Que le dit Louis de Bourbon
Tint à l’auteur sur son ouvrage
Un obligeant et doux langage ;
Et je tiens que d’être estimé
D’un grand roi, des dieux tant aimé,
Est une gloire au sieur Corneille,
Qui n’a presque point de pareille.
C’est pourquoi j’en fais mention.
Et certes, l’approbation
D’une âme belle et souveraine
Doit bien encourager sa veine
Et son esprit ingénieux
À réussir de mieux en mieux.

Édition de 1857 disponible sur Gallica, p. 275-276.


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