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1660

sieur de Villiers, L'Apothicaire dévalisé

Paris, Sercy, 1660

Négociation avec le lecteur

Tout en rappelant le succès de sa pièce lors de la représentation, Villiers s’inquiète de la réaction de son public à la lecture. Sur un ton galant, il implore la bienveillance des lecteurs, si ce n’est pour lui même, du moins pour son libraire.

Au public

Je suis si content de l’approbation que tu as donnée au Festin de pierre que je t’exposai il y a quelques mois, que je me suis persuadé que j’aurais plus de satisfaction, et que je trouverais mieux mon compte à t’adresser cette petite comédie burlesque, sous le titre de L’Apothicaire dévalisé, qu’à lui chercher parmi les grands un protecteur qui l’abandonnerait et qui pesterait peut-être contre son auteur […]

Je reviens donc à toi et je ne te demande rien, pour le présent que je te fais de ce médiocre ouvrage, que la bonté d’en parler médiocrement aussi et de ne pas suivre l’aveugle passion d’un ignorant qui l’a voulu déchirer avant que de savoir s’il était en papier ou en parchemin. […] Ne fais pas de même, je t’en conjure, prends la peine de le lire et, en le lisant, figure-toi toutes les actions qui se peuvent ajouter aux paroles, si tu ne les as point vues à l’Hôtel de Bourgogne ; et je suis assuré que tu me serviras de second contre celui qui parle des choses sans les connaître : Mais non, je te remercie, la partie ne serait pas égale, nous serions trop contre un ; il est tout seul, et qui dit le public, dit tout le monde. Si par bonheur cette petite comédie te plaît, je serais trop payé du peu de peine qu’elle m’a coûté à faire. Si par malheur elle ne te plait pas, oblige moi de n’en rien dire, pour l’amour du libraire, qui n’en vendra pas tant de la moitié si tu lui refuses ton approbation. Cela se doit, ce me semble, à la charité que l’on doit avoir pour son prochain, et tu le dois encore à la manière dont je parle de ce qui vient de moi. Que si ma prière est incivile, ou peu raisonnable, je remets le tout à ton choix, et je me soumets entièrement à ce que tu en diras, parce que tu t’y connais.

Tout auteur de notre calibre
Doit laisser le suffrage libre
Aucuns n’en usent pas ainsi
Qui devraient bien le faire aussi



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