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1674

René Rapin, Réflexions sur la poétique d’Aristote et sur les ouvrages des poètes anciens et modernes

Paris : F. Muguet, 1674

Des spectateurs possédés par la représentation

Parmi les points de continuité entre le théâtre antique et moderne, dans ses Réflexions Rapin invoque la « maladie publique » que les représentations peuvent parfois susciter chez les spectateurs, qu’il s’agisse de l’Andromède d’Euripide ou de la Marianne, tragédie de Du Ryer, jouée par Mondory.

Ce fut aussi par là que l’Andromède d’Euripide, si vantée dans Athénée, et dont Alexandre chanta un épisode dans le dernier banquet de sa vie, fit des effets si merveilleux en la ville d’Abdère, lors qu’elle fut jouée par Archélaos sous le règne de Lysimaque. Les rôles de Persée et d’Andromède, le malheur de cette princesse exposée au monstre marin, et tout ce qu’il y avait d’affreux et de pitoyable dans cette représentation, fit une impression si forte et si violente sur le peuple qu’il sortit du théâtre, dit Lucien, possédé, pour ainsi dire, de ce spectacle, et cette possession devint une maladie publique, dont l’imagination des spectateurs fut saisie. On a vu même dans ces derniers temps quelque crayon grossier de ces sortes d’impressions, que faisait autrefois la tragédie. Quand Mondory jouait la Marianne de Du Ryer, au Marais, le peuple n’en sortait jamais que rêveur et pensif, faisant réflexion à ce qu’il venait de voir, et pénétré à même temps d’un grand plaisir. Mais ce plaisir n’est que superficiel dans les tragédies où la terreur et la pitié n’ont pas d’action.

Ouvrage disponible sur Gallica, p. 180-181.


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