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1694

Laurent Bordelon, Molière comédien aux Champs-Élysées

Lyon, Antoine Briasson, 1694

Le rire du spectateur, rétribution du jeu des comédiens

Dans cette comédie métathéâtrale, Lisette et Scapin, qu'un récit cadre dit être joués par Corinne et Molière, parlent en acteurs de la difficulté de faire rire les spectateurs.

Lisette

[...] c’est un grand talent que de savoir faire rire.

Scapin

Hé, cela est un peu difficile : car, par exemple, voici bien des gens qui ne sont venus ici, et qui n’ont donné de l’argent que pour cela. Que je suis obligé de dire de choses, et de prendre de différentes postures, pour les rendre contents, en les faisant rire autant que vaut l’argent qu’ils ont donné ! Après que j’ai dit un mot qui m’a paru drôle, et que je me suis mis dans une posture qui m’a paru risible, ma première attention, c’est d’examiner si les spectateurs montrent leurs dents en retirant les deux extrémités de la bouche du côté des oreilles, et s’ils font un certain bruit qui marque l’épanouissement de leur rate, c’est-à-dire, s’ils rient. Si cela n’arrive pas, je suis sot comme un panier. M[onsieur], riez donc, je vous prie, pour me faire plaisir, et pour me désottiser, il ne vous en coûtera pas plus.

Lisette

Il est vrai, M[onsieur], que pour marquer que vous n’êtes pas d’humeur à dépenser votre argent mal à propos, vous devriez toujours rire, quand même nous ne vous en donnerions pas le sujet.

Amsterdam, Adrian Braakman, 1697, p. 150-151.

Extrait disponible sur Google Books.


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