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1700

Évariste Gherardi, Les Deux Arlequins

Paris, J. B. Cusson et Pierre Witte, 1700.

Souvenir du comédien Baron

À la fin d’un monologue de la comédie de Le Noble Les deux Arlequins, créée en 1691, Gherardi indique dans une longue didascalie l’empreinte que Baron, comédien vedette de la Comédie-Française, conserve après sa retraite sur les comédiens italiens et les spectateurs.

Dans le récit de ces stances imitées de celles du Cid, Arlequin contrefaisait Monsieur Baron, cet illustre et à jamais regrettable comédien français, qui n'avait point de mouvement qui ne fût une perfection, et point de perfection qui ne fût un miracle. Sa retraite de la troupe fit grossir la recette des comédiens italiens de plus de vingt mille livres par an, car il était tellement aimé à la Cour et à la Ville, que le monde qui ne jouissait plus du plaisir de le voir sur le théâtre français en original, courait en foule en admirer la copie au théâtre italien. Lorsqu'on était averti qu'Arlequin l'imitait dans quelqu'un de ses rôles, où cet acteur réussissait si bien, et avec tant de succès, qu'un soir après l'avoir contrefait en récitant les stances ci-dessus à visage découvert et en habit de ville, à la table de Monseigneur le Prince à Versailles, à la présence de plusieurs autres princes et princesses du sang, et de plusieurs des premiers seigneurs et dames de la Cour, il eut l’honneur et le plaisir de s’entendre dire d’une commune voix par toute l’auguste assemblée qu’il ne lui manquait de Baron que les traits du visage, tant il est vrai que l’amitié que nous avons pour quelqu’un nous aveugle, et nous fait souvent croire que nous le retrouvons dans les gens qui lui ressemblent le moins.

Le Noble, Les deux Arlequins, dans Évariste Gherardi, Le théâtre italien de Gherardi, ou le Recueil général de toutes les comédies et scènes françaises jouées par les comédiens italiens du roi, pendant tout le temps qu'ils ont été au service, Amsterdam, Isaac Elzevir, 1707, t. III, p. 351-352.

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