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1702

Jean-Baptiste Morvan de Bellegarde, Lettres curieuses de littérature et de morale

Paris : J. et M. Guignard, 1702.

Critiques virulentes du théâtre

S’il existe des critiques du théâtre modérées, Bellegarde rappelle que beaucoup le condamnent encore totalement en se fondant sur la tradition et les écrits religieux. Il en va de même de la danse.

[L]es censeurs des spectacles sont intraitables et n’entendent point raillerie ; ils crient, ils tonnent contre les comédies et les comédiens et les damnent sans miséricorde. Ils les accablent d’une foule de passages tirés des conciles et des Pères, et même de la Sainte-Écriture, qui sont autant d’anathèmes lancés contre la comédie ; car ils la regardent comme une occasion prochaine du péché, puisqu’on y trouve tout ce qui peut plaire aux yeux, charmer les oreilles et séduire le cœur. En effet, disent-ils, le but des comédiens est d’émouvoir les spectateurs pour les faire entrer dans toutes les passions qu’ils représentent et dont les âmes faibles se laissent aisément surprendre. […] La danse, compagne ordinaire des spectacles, vient à peu près de la même source : d’abord elle était toute naturelle et telle qu’elle s’est conservée parmi le petit peuple. Mais, comme l’on raffine toujours, on en fit un art et on y mêla une infinité de pas très subtils et d’agréments qui ne purent être pratiqués que par un fort petit nombre de gens, et qui ne contribuent pas peu à amollir et à corrompre le cœur par les postures qui font la principale beauté de la danse.

Extrait de la cinquième lettre, « Sur les pièces de théâtre », disponible sur Gallica, p. 393-395.


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