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1669

(Antoine Jacob dit) Montfleury, Le Procès de la femme juge et partie

Paris : G. Quinet, 1670

Apologie de l'opinion contradictoire

A la scène 1 de l'acte I, Oronte se plaint à son ami Zélan de la folie de sa jeune femme qui se mêle, avec ses amies, de littérature. Elles ont décidé dans cette pièce de juger la comédie La Femme juge et partie de Montfleury, parue en 1669. Zélan explique alors sa conception étonnante de la critique dramatique.

ORONTE.
Tu les verras tantôt venir en magistrats
Examiner ici la force et la faiblesse,
Et donner un arrêt sanglant contre la pièce.

ZELAN.
Dans un si beau dessein je les veux seconder :
Je me sens en humeur à la vouloir fronder
Et, quoique dans le fond je la trouve charmante,
Parce qu’on l’applaudit et que chacun la vante,
Je tâche à la détruire et je veux en ce jour,
Cet arrêt à la main, braver toute la cour.
Si l’on en parlait mal, je la soutiendrais belle ;
C’est mon style.

ORONTE.
Vraiment, ta méthode est nouvelle.

ZELAN.
Qui ne contredit point n’est pas un bel esprit.
Aussitôt qu’à la cour quelqu'un loue et écrit,
Souvent, sans l’avoir vu, sans connaissance aucune,
Je me bande moi seul contre la voix commune.
Je dis qu’il ne vaut rien...il faut avoir bon sens... Mais morbleu, j’aperçois un de ses partisans.
Nous allons quereller, il se détourne en diable
Pour l’applaudir, et moi, pour la dire effroyable.

Paris : la Compagnie des libraires, 1739, t. II, p. 98-99


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