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1669

(Antoine Jacob dit) Montfleury, Le Procès de la femme juge et partie

Paris : G. Quinet, 1670

Le verdict final

Une académie de femmes se réunit pour juger la dernière comédie de Montfleury, La Femme juge et partie, parue en 1669. Après avoir examiné dans le détail les questions de vraisemblance et de bienséance, la Présidente Dorimène rend son verdict.

DORIMENE.
Le sort me jette ici dans un grand embarras :
Elle a bien des beautés, des grâces, des appâts,
Son mérite éclatant fait charmer la tristesse,
Chacun s’y divertit, l’on y rit, l’on s’y presse ;
Mais pour ne rien omettre au fait d’un tel procès,
Doit-elle pas rougir d’un si fameux succès ?
Quand, par une fortune infâme et malheureuse,
Elle met en honneur la farce scandaleuse.
Je lui pardonnerais un tel emportement,
Si je lui voyais l’art de railler finement,
Et si, d’un voile adroit l’ordure enveloppée,
La pudeur se voyait heureusement trompée.
Mais la voir surpasser sous un sexe emprunté,
L’impudente soubrette et le page effronté,
Et vouloir devant nous faire l’honnête femme,
Ne devrions nous pas pas la traiter comme infâme
Pour avoir en public dépouillé sa pudeur,
D’un sexe si charmant, l’apanage et l’honneur,
Et par un feu public punir son innocence ?
Mais, si vous m’en croyez, penchons vers la clémence,
Ordonnons par pitié, pour raison de ces faits,
Qu’elle entre au cabinet et n’en sorte jamais.

Paris : la Compagnie des libraires, 1739, t. II, p. 119


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