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1668

Gabriel Guéret, Le Parnasse réformé

Paris, T. Jolly, 1668

Critères pour juger de la qualité d'une tragédie

Le narrateur conte à Nicandre le songe merveilleux qu'il a fait : les auteurs, anciens et modernes, arrivent au Parnasse pour vanter leurs mérites auprès d'Apollon. Puget de la Serre intervient alors pour définir ce qui selon lui constitue les preuves de la qualité d'une tragédie : les règles poétiques sont moins importantes que la capacité à faire pleurer le spectateur et à rassembler un public nombreux.

J’ai donné au théâtre plusieurs tragédies en prose, sans savoir ce que c’était que la tragédie. J’ai laissé la lecture de La Poétique d’Aristote et de Scaliger à ceux qui ne sont pas capables de faire des règles de leur chef, et sans parler du Sac de Carthage ni de Sainte Catherine, qui ont été représentées avec succès, on sait que Thomas Morus s’est acquis une réputation que toutes les autres comédies du temps n’avaient jamais eue. Monsieur le Cardinal de Richelieu, qui m’entend, a pleuré dans toutes les représentations qu’il a vues de cette pièce. Il lui a donné des témoignages publiques de son estime ; et toute la cour ne lui a pas été moins favorable que son Éminence. Le Palais-Royal était trop petit pour contenir ceux que la curiosité attirait à cette tragédie. On y suait au mois de décembre et l’on tua quatre portiers de compte fait la première fois qu’elle fut jouée. Voilà ce qu’on appelle de bonnes pièces : Monsieur Corneille n’a point de preuves si puissantes de l’excellence des siennes, et je lui céderai volontiers le pas, quand il aura fait tuer cinq portiers en un seul jour.

En ligne sur Google Books, p. 48.


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