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1661

Jean Loret, La Muse historique

Paris, Chénault, [1656-1665].

Compte-rendu de la Toison d’or

Dans sa lettre du 19 février 1661, Loret fait un compte-rendu dithyrambique de la pièce à spectacle qu’est la Toison d’or de Pierre Corneille :

La Conquête de la Toison
Que fit, jadis, défunt Jason,
Pièce infiniment excellente,
Enfin, dit-on, se représente
Au jeu de paume du Marais,
Avec de grandissimes frais.
Cette pièce du grand Corneille,
Propre pour l’œil et pour l’oreille,
Est maintenant, en vérité,
La merveille de la cité,
Par ses scènes toutes divines,
Par ses surprenantes machines,
Par ses concerts délicieux,
Par le brillant aspect des dieux,
Par des incidents mémorables,
Par cent ornements admirables,
Dont Sourdiac, marquis normand,
Pour rendre le tout plus charmant,
Et montrer sa magnificence,
A fait l’excessive dépense,
Et si splendide, sur ma foi,
Qu’on dirait qu’elle vient d’un roi.
J’apprends que ce rare spectacle
Fait à plusieurs crier miracle,
Et je crois qu’au sortir de là
On ne plaindra point, pour cela,
Pistole, ni demi-pistole,
Je vous en donne ma parole.
Ô Corneille, charmant auteur,
Du Parnasse excellent docteur,
Illustre enfant de Normandie,
N’ayant pas vu ta comédie,
Qui portera ton nom bien haut,
Je n’en parle pas comme il faut.
C’est de quoi notre simple muse
Te demande, humblement, excuse.
J’espère bien, dans peu de jours,
Suivant le général concours,
Aller admirer ton ouvrage.
Mais point du tout je ne m’engage
À rendre ton los immortel,
Car c’est toi qui l’as rendu tel.

Transcription de David Chataignier disponible sur le site Molière21.


Pour indiquer la provenance des citations : accompagner la référence de l’ouvrage cité de la mention « site Naissance de la critique dramatique »