Durant l’été 2016, la Faculté des lettres a donné carte blanche au photographe Alain Kilar pour réaliser une série d’images offrant un regard neuf sur l’Anthropole.
Expert dans l’art de rendre par l’image la majesté architecturale des cathédrales, Alain Kilar nous a semblé tout désigné, au moment où nous avons initié le projet de commémorer les trente ans de l’Anthropole, pour arracher l’iconographie de ce temple des sciences humaines à des fins strictement documentaires. Alors que la réflexion sur la photographie constitue l’un des pôles de recherche interdisciplinaires de la Faculté des lettres de l’UNIL, il s’est agi avant tout de renouveler le regard que portent sur l’édifice ses usagers en conférant au quotidien une étrangeté qui confine à l’abstraction géométrique.
Le noir et blanc contrasté, la très grande profondeur de champ et les angles inédits peuvent certes évoquer des espaces a priori peu conviviaux tels que l’univers carcéral de Piranesi, l’édifice babélien de l’album de bande dessinée La Tour de Schuiten et Peeters ou encore les dédales d’une lithographie d’Escher.
Dans les trois triptyques de cette exposition, couloirs et escaliers semblent en effet désertés, privés de vie estudiantine comme si s’était actualisé le futur dystopique d’une généralisation de l’enseignement à distance. Mais, on le sait, il n’y a pas de sciences sans l’humain : ce sont les visiteurs eux-mêmes qui sont invités à se projeter dans ces images, et à redécouvrir un lieu familier selon de nouvelles perspectives, en adoptant cette posture réflexive si chère aux chercheuses et chercheurs en sciences humaines.
Alain Boillat, doyen de la Faculté des lettres