La situation du BFSH2 et son intégration au site étaient primordiales pour les architectes. Le plan directeur prévoyait une deuxième étape de construction, en prolongement du BFSH 1 (actuel Internef) construit en 1977 par les architectes Frédéric Brugger, Edouard Catella et Erich Hauenstein. Le BFSH1 ne pouvant accueillir que 1600 personnes, l’agrandissement devait augmenter sa capacité à 3600 personnes au total. La fonctionnalité du bâtiment asymétrique semble clairement l’emporter sur la recherche d’un volume parfait; grâce à cette asymétrie, on aurait facilement pu greffer au BFSH1 de nouveaux éléments, comme cela a été fait avec l’ajout d’une bibliothèque. Cette solution est pourtant rapidement écartée. Le deuxième BFSH sera conçu dans un style nouveau, en trouvant un moyen de relier les deux bâtiments de manière harmonieuse.
Le bâtiment crée une géométrie nouvelle: son axe longitudinal forme une diagonale et ses façades introduisent des lignes parallèles ou perpendiculaires. Par son orientation en diagonale par rapport au BFSH1 (préférant longer le terrain que de s’aligner à son prédécesseur), l’actuel Anthropole s’en distancie. Stylistiquement, les deux bâtiments s’opposent: le premier pousse le fonctionnalisme parfois au détriment de la forme, le second exhibe une recherche de la forme et de l’esthétique, parfois au détriment de la fonction.
La préservation du paysage, la conservation des espaces verts et l’harmonie entre espaces bâti et naturel étaient essentielles pour le BUD, ainsi que pour Bevilacqua, Dumas et Thibaud. L’analyse topographique du terrain, la manière d’y intégrer au mieux le bâtiment, la mise en valeur du paysage: autant de questions que se sont posées les architectes. Le BFSH 2 longiligne suit le terrain (l’autoroute existait en 1987, mais pas le métro); le territoire s’en retrouve circonscrit et en même temps souligné.
En plus de tenir compte de la topographie du site et de l’architecture voisine, les architectes du BFSH2 doivent concevoir une circulation pédestre aisée avec le BFSH1. Dans un premier temps, ils proposent de relier les deux bâtiments par des gradins semi-circulaires, formant une sorte d’amphithéâtre. Finalement, une rampe d’accès est réalisée, dans laquelle passe un tunnel; la rampe coupe les fenêtres du tunnel de liaison, créant un jeu saccadé d’ouvertures et de lumière à l’intérieur du passage. À l’origine, l’espace vert entre les BFSH 1 et 2 était vide, mais Guido Cocchi y fait installer une fontaine de bronze et de granit (Pierre Oulevay, 1994), ce qui a fortement déplu aux architectes.
Du béton, de la géométrie et de la lumière
Le béton est la matière principale du bâtiment, mis en scène par la lumière naturelle des multiples ouvertures vitrées. Au-delà de l’élément constructif, le matériau participe à la beauté du BFS 2. La masse de béton est telle que son coût atteignit environ 18% du budget total; souhaitant un béton clair et non gris, les architectes optent pour un mélange de ciment de Roche et de sable de Neuchâtel, plus onéreux que la formule standard. Les plaques de béton sont préfabriquées, puis reliées entre elles par des joints négatifs. Ceci sert à masquer la reprise du bétonnage (phase de travail où des fissures apparaissent) et à marquer une trame, mais peut aussi constituer un langage architectural. Utilisé lors de changements de matériaux, il permet de faire des transitions de texture, de couleur, de matière: d’abord un besoin technique, le joint négatif crée une grammaire esthétique.
Le deuxième facteur esthétique du BFSH2 est sa géométrie simple, maîtrisée et soignée. Bevilacqua décrit Dumas comme étant obnubilé par les formes: carrés, triangles et cercles se retrouvent partout dans le bâtiment. Le choix des trois X et des façades non rectilignes permet de gagner de la place tout en créant un bâtiment aéré, harmonieux et dont les bureaux disposent de lumière naturelle. Les losanges qui se blottissent dans les creux de la structure en « accordéon » correspondent aux auditoires; la forme de ceux-ci, selon le plan directeur, reste libre et échappe aux règles de dimension. La géométrie est autant visible dans la structure (tels que la forme générale, les panneaux de béton, les escaliers) que dans les détails (notamment les lucarnes, les faux plafonds, les caissons acoustiques, les variations de couleur au sol).
Sur le toit plat, on retrouve les formes (cercle, triangle, carré) qui parsèment l’édifice: ce sont les superstructures techniques (moteurs des ascenseurs, ventilateurs, etc.). Ces éléments sont reliés entre eux (sauf les demi-cercles aux extrémités) par des pans de verre qui constituent les importants puits de lumière du BFSH2. L’éclairage naturel est l’un des principes essentiels du plan directeur; que ce soit un éclairage direct ou non, les vitres omniprésentes laissent la lumière s’infiltrer, comme dans les cages d’escalier.