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Définition de la magie

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Nous posons, provisoirement, en principe, que la magie a été suffisamment distinguée, dans les diverses sociétés, des autres systèmes de faits sociaux. S’il en est ainsi, il y a lieu de croire que non seulement elle constitue une classe distincte de phénomènes, mais encore qu’elle est susceptible d’une définition claire. Cette définition, nous devons la faire pour notre compte, car nous ne pouvons nous contenter d’appeler magiques les faits qui ont été désignés comme tels par leurs acteurs ou par leurs spectateurs. Ceux-ci se plaçaient à des points de vue subjectifs, qui ne sont pas nécessairement ceux de la science. Une religion appelle magiques les restes d’anciens cultes avant même que ceux-ci aient cessé d’être pratiqués religieusement ; cette façon de voir s’est déjà imposée à des savants et, par exemple, un folkloriste aussi distingué que M. Skeat [1] considère comme magiques les anciens rites agraires des Malais. Pour nous, ne doivent être dites magiques que les choses qui ont vraiment été telles pour toute une société et non pas celles qui ont été ainsi qualifiées seulement par une fraction de société. Mais, nous savons aussi que les sociétés n’ont pas eu toujours de leur magie une conscience très claire et que, quand elles l’ont eue, elles n’y sont arrivées que lentement. Nous n’espérons donc pas trouver tout de suite les termes d’une définition parfaite qui ne pourra venir qu’en conclusion d’un travail sur les rapports de la magie et de la religion [2].

MaussLa magie comprenant des agents, des actes et de la croyance des représentations, nous appelons magiciens l’individu qui accomplit les actes magiques, même quand il n’est pas un professionnel.]].

JPEG Loic Hamon © Musée d’Archéologie nationale – Domaine national de Saint-Germain-en-Laye La magie comprenant des agents, des actes et des représentations : nous appelons magicien l’individu qui accomplit des actes magiques, même quand il n’est pas un professionnel ; nous appelons représentations magiques les idées et les croyances qui correspondent aux actes magiques ; quand aux actes, par rapport auxquels nous définissons les autres éléments de la magie, nous les appelons rites magiques. Il Page 13importe dès maintenant de distinguer ces actes des pratiques sociales avec lesquelles ils pourraient être confondus.

Les rites magiques et la magie tout entière sont, en premier lieu, des faits de tradition. Des actes [3] qui ne se répètent pas ne sont pas magiques. Des actes à l’efficacité desquels tout un groupe ne croit pas, ne sont pas magiques. La forme des rites est éminemment transmissible et elle est sanctionnée par l’opinion. D’où il suit que des actes strictement individuels, comme les pratiques superstitieuses particulières des joueurs, ne peuvent être appelés magiques.

Les pratiques traditionnelles avec lesquelles les actes magiques peuvent être confondus sont : les actes juridiques, les techniques, les rites religieux. On a rattaché à la magie le système de l’obligation juridique, pour la raison que, de part et d’autre, il y a des mots et des gestes qui obligent et qui lient, des formes solennelles. Mais si, souvent, les actes juridiques ont un caractère rituel, si le contrat, les serments, l’ordalie, sont par certains côtés sacramentaires, c’est qu’ils sont mélangés à des rites, sans être tels par eux-mêmes [4]. Dans la mesure où ils ont une efficacité particulière, où ils font plus que d’établir des relations contractuelles entre des êtres, ils ne sont pas juridiques, mais magiques ou religieux. Les actes rituels, au contraire, sont, par essence, capables de produire autre chose que des conventions ; ils sont éminemment efficaces ; ils sont créateurs ; ils font. Les rites magiques sont même plus particulièrement conçus comme tels ; à tel point qu’ils ont souvent tiré leur nom de ce caractère effectif : dans l’Inde, le mot qui correspond le mieux au mot rite est celui de karman, acte ; l’envoûtement est même le factum, krtyâ par excellence ; le mot allemand de Zauber a le même sens étymologique ; d’autres langues encore emploient pour désigner la magie des mots dont la racine signifie faire.

Mais les techniques, elles aussi, sont créatrices. Les gestes qu’elles comportent sont également réputés efficaces. A ce point de vue, la plus grande partie de l’humanité a peine à les distinguer des rites. Il n’y a peut-être pas, d’ailleurs, une seule des fins auxquelles atteignent péniblement nos arts et nos industries que la magie n’ait été censée atteindre. Tendant aux mêmes buts, elles s’associent naturellement et leur mélange est un fait constant ; mais il se produit en proportions variables. En général, à la pêche, à la chasse et dans l’agriculture, la magie côtoie la technique et la seconde. D’autres arts sont, Page 14pour ainsi dire, tout entiers pris dans la magie. Telles sont la médecine, l’alchimie ; pendant longtemps, l’élément technique y est aussi réduit que possible, la magie les domine ; elles en dépendent à ce point que c’est dans son sein qu’elles semblent s’être développées. Non seulement l’acte médical est resté, presque jusqu’à nos jours, entouré de prescriptions religieuses et magiques, prières, incantations, précautions astrologiques, mais encore les drogues, les diètes du médecin, les passes du chirurgien, sont un vrai tissu de symbolismes, de sympathies, d’homéopathies, d’antipathies, et, en réalité, elles sont conçues comme magiques. L’efficacité des rites et celle de l’art ne sont pas distinguées, mais bien pensées en même temps.

La confusion est d’autant plus facile que le caractère traditionnel de la magie se retrouve dans les arts et dans les industries. La série des gestes de l’artisan est aussi uniformément réglée que la série des gestes du magicien. Cependant, les arts et la magie ont été partout distingués, parce qu’on sentait entre eux quelque insaisissable différence de méthode. Dans les techniques, l’effet est conçu comme produit mécaniquement. On sait qu’il résulte directement de la coordination des gestes, des engins et des agents physiques. On le voit suivre immédiatement la cause ; les produits sont homogènes aux moyens : le jet fait partir le javelot et la cuisine se fait avec du feu. De plus, la tradition est sans cesse contrôlée par l’expérience qui met constamment à l’épreuve la valeur des croyances techniques. L’existence même des arts dépend de la perception continue de cette homogénéité des causes et des effets. Quand une technique est à la fois magique et technique, la partie magique est celle qui échappe à cette définition. Ainsi, dans une pratique médicale, les mots, les incantations, les observances [5] rituelles ou astrologiques sont magiques ; c’est là que gîtent les forces occultes, les esprits et que règne tout un monde d’idées qui fait que les mouvements, les gestes rituels, sont réputés avoir une efficacité toute spéciale, différente de leur efficacité mécanique. On ne conçoit pas que ce soit l’effet sensible des gestes qui soit le véritable effet. Celui-ci dépasse toujours celui-là et, normalement, il n’est pas du même ordre ; quand, par exemple, on fait pleuvoir, en agitant l’eau d’une source avec un bâton. C’est là le propre des rites qu’on peut appeler des actes traditionnels d’une efficacité sui generis.

Page 15Mais nous ne sommes encore arrivés qu’à définir le rite et non pas le rite magique, qu’il s’agit maintenant de distinguer du rite religieux. M. Frazer, nous l’avons vu, nous a proposé des critères [6]. Le premier est que le rite magique est un rite sympathique. Or, ce signe est insuffisant. Non seulement il y a des rites magiques qui ne sont pas des rites sympathiques, mais encore la sympathie n’est pas particulière à la magie, puisqu’il y a des actes sympathiques dans la religion. Lorsque le grand prêtre, dans le temple de Jérusalem, à la fête de Souccoth [7], versait l’eau sur l’autel, en tenant les bras élevés, il accomplissait évidemment un rite sympathique destiné à provoquer la pluie. Lorsque l’officiant hindou, au cours d’un sacrifice solennel, allonge ou raccourcit à volonté la vie du sacrifiant, suivant le trajet qu’il fait accomplir à la libation, son rite est encore éminemment sympathique. De part et d’autre, les symboles sont parfaitement clairs ; le rite semble agir par lui-même ; cependant, dans l’un et dans l’autre cas, il est éminemment religieux : les agents qui l’accomplissent, le caractère des lieux ou les divinités présentes, la solennité des actes, les intentions de ceux qui assistent au culte, ne nous laissent à cet égard aucun doute. Donc, les rites sympathiques peuvent être aussi bien magiques que religieux.

Le second critère, proposé par M. Frazer, est que le rite magique agit d’ordinaire par lui-même, qu’il contraint, tandis que le rite religieux adore et concilie ; l’un a une action mécanique immédiate ; l’autre agit indirectement et par une espèce de respectueuse persuasion ; son agent est un intermédiaire spirituel. Mais cette distinction est encore loin d’être suffisante [8] ; car souvent le rite religieux contraint, lui aussi, et le dieu, dans la plupart des religions anciennes, n’était nullement capable de se soustraire à un rite accompli sans vice de forme. De plus, il n’est pas exact, et nous le verrons bien, que tous les rites magiques aient eu une action directe [9], puisqu’il y a des esprits dans la magie et que même les dieux y figurent. Enfin, l’esprit, dieu ou diable, n’obéit pas toujours fatalement aux ordres du magicien, qui finit par le prier [10].
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Il nous faut donc chercher d’autres signes. Pour les trouver, procédons par divisions successives.

MaussParmi les rites, il y en a qui sont certainement religieux ce sont les rites solennels, publics, obligatoires, réguliers ; tels, les fêtes et les sacrements. Cependant, il y a des rites de Page 16ce caractère que M. Frazer n’a pas reconnus comme religieux ; pour lui, toutes les cérémonies des Australiens, la plupart des cérémonies d’initiation, en raison des rites sympathiques qu’elles enveloppent, sont magiques [11]. Or, en fait, les rites de clans [12] des Aruntas, rites dits de l’intichiuma [13], les rites tribaux de l’initiation, ont précisément l’importance, la gravité, la sainteté qu’évoque le mot de religion. Les espèces et les ancêtres totémiques présents au cours de ces rites sont bien de ces puissances respectées ou craintes dont l’intervention est pour M. Frazer lui-même, le signe de l’acte religieux. Elles sont même invoquées au cours des cérémonies.

Il y a d’autres rites, au contraire, qui sont régulièrement magiques. Ce sont les maléfices. Nous les voyons ainsi qualifiés constamment par le droit et la religion. Illicites, ils sont expressément prohibés et punis. Ici l’interdiction marque, d’une façon formelle, l’antagonisme du rite magique et du rite religieux. C’est même elle qui fait le caractère magique du maléfice, car il y a des rites religieux qui sont également malfaisants ; tels sont certains cas de devotio, les imprécations contre l’ennemi de la cité, contre le violateur d’une sépulture ou d’un serment, enfin tous les rites de mort qui sanctionnent des interdictions rituelles. On peut même dire qu’il y a des maléfices qui ne sont tels que par rapport à ceux qui les craignent. L’interdiction est la limite dont la magie tout entière se rapproche.

Ces deux extrêmes forment, pour ainsi dire, les deux pôles de la magie et de la religion : pôle du sacrifice, pôle du maléfice. Les religions se créent toujours une sorte d’idéal vers lequel montent les hymnes, les vœux, les sacrifices et que protègent les interdictions. Ces régions, la magie les évite. Elle tend vers le maléfice, autour duquel se groupent les rites magiques et qui donne toujours les premières lignes de l’image que l’humanité s’est formée de la magie. Entre ces deux pôles, s’étale une masse confuse de faits, dont le caractère spécifique n’est pas immédiatement apparent. Ce sont les pratiques qui ne sont ni interdites, ni prescrites d’une façon spéciale. Il y a des actes religieux qui sont individuels et facultatifs ; il y a des actes magiques qui sont licites. Ce sont, d’une part, les actes occasionnels du culte de l’individu, d’autre part, les pratiques magiques associées aux techniques, celles de la médecine, par exemple. Un paysan de chez nous, qui exorcise les mulots de son champ, un Indien, qui Page 17prépare sa médecine de guerre, un Finnois, qui incante son arme de chasse, poursuivent des buts parfaitement avouables et accomplissent des actes permis. La parenté de la magie et du culte domestique est même telle que nous voyons, en Mélanésie, la magie se produire dans la série des actes qui ont pour objets les ancêtres. Bien loin de nier la possibilité de ces confusions, nous croyons même devoir y insister, quitte à en réserver pour plus tard l’explication [14]. Pour le moment, nous accepterions presque la définition de Grimm, qui considérait la magie comme « une espèce de religion faite pour les besoins inférieurs de la vie domestique » [15]. Mais quel que soit l’intérêt que présente pour nous la continuité de la magie et de la religion, il nous importe, pour le moment, avant tout, de classer les faits, et, pour cela, d’énumérer un certain nombre de caractères extérieurs auxquels on puisse les reconnaître. Car leur parenté n’a pas empêché les gens de sentir la différence des deux sortes de rites et de les pratiquer de façon à marquer qu’ils la sentaient. Nous avons donc à rechercher des signes qui nous permettent d’en faire le triage.

Tout d’abord, les rites magiques et les rites religieux ont souvent des agents différents ; ils ne sont pas accomplis par les mêmes individus. Quand, par exception, le prêtre fait de la magie, son attitude n’est pas l’attitude normale de sa fonction ; il tourne le dos à l’autel, il fait avec la main gauche ce qu’il devrait faire avec la main droite, et ainsi de suite.

Mais il y a bien d’autres signes qu’il nous faut grouper. D’abord, le choix des lieux où doit se passer la cérémonie magique. Celle-ci ne se fait pas communément dans le temple ou sur l’autel domestique ; elle se fait d’ordinaire dans les bois, loin des habitations, dans la nuit ou dans l’ombre, ou dans les recoins de la maison, c’est-à-dire à l’écart. Tandis que le rite religieux recherche en général le grand jour et le public, le rite magique le fuit. Même licite, il se cache, comme le maléfice. Même lorsqu’il est obligé d’agir en face du public, le magicien cherche à lui échapper ; son geste se fait furtif, sa parole indistincte ; l’homme-médecine, le rebouteux, qui travaillent devant la famille assemblée, marmonnent leurs formules, esquivent leurs passes et s’enveloppent dans des extases simulées ou réelles. Ainsi, en pleine société, le magicien s’isole, à plus forte raison quand il se retire au fond des bois. Même à l’égard de ses collègues, il garde presque toujours son quant à soi ; il se réserve. L’isolement, Page 18comme le secret, est un signe presque parfait de la nature intime du rite magique. Celui-ci est toujours le fait d’un individu ou d’individus agissant à titre privé ; l’acte et l’acteur sont enveloppés de mystère.

Ces divers signes ne font, en réalité, qu’exprimer l’irréligiosité du rite magique ; il est et on veut qu’il soit anti-religieux. En tout cas, il ne fait pas partie d’un de ces systèmes organisés que nous appelons cultes. Au contraire, une pratique religieuse même fortuite, même facultative, est toujours prévue, prescrite, officielle. Elle fait partie d’un culte. Le tribut rendu aux divinités à l’occasion d’un vœu, d’un sacrifice expiatoire pour cause de maladie est toujours, en définitive, un hommage régulier, obligatoire, nécessaire même, quoiqu’il soit volontaire. Le rite magique, au contraire, bien qu’il soit quelquefois fatalement périodique (c’est le cas de la magie agricole), ou nécessaire, quand il est fait en vue de certaines fins (d’une guérison, par exemple), est toujours considéré comme irrégulier, anormal et, tout au moins, peu estimable. Les rites médicaux, si utiles et si licites qu’on puisse se les figurer, ne comportent ni la même solennité, ni le même sentiment du devoir accompli qu’un sacrifice expiatoire ou un vœu faits à une divinité curative. Il y a nécessité et non pas obligation morale dans le recours à l’homme-médecine, au propriétaire de fétiche ou d’esprit, au rebouteux, au magicien [16].

Cependant, nous avons quelques exemples de cultes magiques. Tel est le culte d’Hécate dans la magie grecque, celui de Diane et du diable dans la magie du Moyen Age, toute une partie du culte de l’un des plus grands dieux hindous, Rudra-Çiva. Mais ce sont là des faits de seconde formation, et qui prouvent tout simplement que les magiciens se sont fait un culte pour leur compte, modelé sur les cultes religieux.

Nous avons obtenu de la sorte une définition provisoirement suffisante du rite magique. Nous appelons ainsi tout rite qui ne fait pas partie d’un culte organisé, rite privé, secret, mystérieux et tendant comme limite vers le rite prohibé. De cette définition, en tenant compte de celle que nous avons donnée des autres éléments de la magie, résulte une première détermination de sa notion. On voit que nous ne définissons pas la magie par la forme de ses rites, mais par les conditions dans lesquelles ils se produisent et qui marquent la place qu’ils occupent dans l’ensemble des habitudes sociales.Non attribuéPage 19

Dans les notes d’Hubert, il existe un dossier intitulé « Définition de la magie » qui est l’œuvre de Marcel Mauss.

JPEG Loic Hamon © Musée d’Archéologie nationale – Domaine national de Saint-Germain-en-Laye La façon dont le rôle magique agit provient surtout des forces qu’il met fen mouvement. Normalement il agit par lui-même, ou par des forces vagues, ou par des esprits qui ne sont pas des dieux. Reste le cas où il agit sur les dieux, même alors, il ne les traite pas momentanément comme tels, il les subordonne d’une façon anormale. La magie a toujours un minimum d’irréligiosité. La religion quand elle se mêle d’adoration proprement dite, de culte, c’est ou bien qu’elle se modèle sur la religion (cultes du diable) ou bien qu’elle se mêle à celle-ci.

Le rite religieux, même quand il est presque directement efficace, n’agit que sur des puissances grandes, sacrées, considérées comme telle, respectées (mises en dehors de l’atteinte normale de l’homme) (anal. De l’intichiuma). Il s’adresse avant tout à elles, et par un certain côté son action est toujours médiate.

Le rite purement magique, même quand il agit à l’aide de dieux, de [ill], de sacrifices, etc. agit ne s’adresse pas aux puissances religieuses, ne se dirige pas vers elles, il les dirige immédiatement vers le but à atteindre, elles ne sont pas choses toujours un peu indépendantes vis à vis de lui. La prière, l’offrande faites aux esprits magiques ne sont que des simulations relatives des dons et des élans de l’âme. Le rite magique ou bien n’est pas destiné aux puissances divines, ou bien il n’agit pas ne les traite pas comme tels.

Nous arrivons donc à une série de signes suffisamment objectifs et aussi suffisamment apparents. Parmi les rites, c’est à dire parmi les pratiques traditionnelles d’une efficacité

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des moyens de le différencier d’un rite religieux. C’est ainsi qu’un rite qui se fait sur l’autel domestique, régulièrement, ne peut guère être magique. Au contraire, un rite accompli par un magicien proprement dit n’est que rarement religieux. Une prière, une supplication adorative, un vœu, ne peut pas être une incantation ; mais une incantation de démons auxiliaires peut difficilement être religieuse. En somme lorsque parmi les rites non obligatoires il y en a qui ont un certain caractère d’irréligiosité, qui sans être anti religieux sont extra religieux on les reconnait à bon droit comme magique. Mais cette irréligiosité a des signes : Nous allons en énumérer quelques uns.

En premier lieu un rite [ill] est d’ordinaire magique, pratiqué par l’individu, dans les bois, loin des habitations, ou de nuit, dans l’ombre des caves ou des recoins de la maison. Le rite facultatif, domestique ou non, est au contraire accompli au temple ou dans le cercle des initiés, avec du public.

Si tous les rites magiques étaient secrets, [ill] il n’y aurait plus à découvrir d’autres signes. Mais un certain nombre d’entre eux ne sont nullement secrets, tels ceux de la magie médicale, ceux du faiseur de pluie, assez souvent. Et d’autre part des rites religieux facultatifs peuvent être assez souvent accomplis en secret. Il est temps par conséquent

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[ill], collectives, simples [ill] et inductives. Qu’est ce qui distingue le rite magique du rite religieux. Il doit y avoir des [ill] puisque nous avons vu dans les sociétés les plus divisées un nombre considérable de faits mériter un nom spécial, être l’objet de considérations spéciales.

Parmi les rites, un certain nombre sont certainement religieux : les rites solennels, publics, obligatoires, réguliers, les fêtes, sacrifices, hymnes, actes sacramentaires (mariage, initiation) etc. Ce n’est que pour un certain nombre d’autres, toute la série des rites facultatifs que la question se pose, et en effet on a vu, dans l’Inde, en Mélanésie, chez les nations Iroquoises et Cherokees, le rituel culte domestique, les rites de vœux, des sacrifices occasionnels, de culte individuel public et en un mot étroitement voisin des rituels magiques. Il s’agit de les différencier. Certes nous ne [trouvons ?] des frontières absolues entre deux ordres de faits, lesquels [ill] la plus parfaite continuité ; il n’y a selon nous des rites magiques par certains traits, religieux par d’autres. Il s’agit simplement. Nous n’avons donc pour but que d’indiquer certains signes auxquels on reconnaitra ceux d’entre les rites qui sont plus particulièrement magiques.

Les rites magiques sont souvent illicites et criminels. Lorsqu’un est expressément défendu, blâmé par le droit et la religion, il y a bien des chances qu’il soit magique. Il ne faudrait pas supposer, par une singulière méprise de langue que nous

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JPEG Loic Hamon © Musée d’Archéologie nationale – Domaine national de Saint-Germain-en-Laye disions magiques tout acte proscrit par la religion. A ce compte, la violation d’un tabou serait un acte magique. Mais il existe parmi des actes positifs des rites, qui sont soigneusement interdits par la religion, et qui, comme ils sont pourtant des rites, ne peuvent être que magiques. Dans cette catégorie rentrent évidemment tous les rites d’envoutement, d’imprécations, de mise à mort secrète, de maléfices, que les mœurs et les religions ont toujours sévèrement punis. D’ailleurs sur ce point il serait possible encore de raffiner. Il faut toujours prendre garde que tout rite d’enchantement, même d’un ennemi, n’est pas nécessairement un rite magique : ainsi quand elle se fait par l’invocation de divinités, ou quand elle a lieu au cour d’un sacrifice, le rite permis pour l’individu ou la collectivité qui le pratique n’est défendu, souvent que pour l’individu ou la collectivité [ill].

Le rite illicite est donc d’ordinaire rite magique.

Mais si tous les rites sont magiques, tous les rites magiques ne sont pas nécessairement interdits, illicites.

Souvent même ces rites sont vraiment indiscernables de ceux des rituels privés avec lesquels ils sont souvent confondus d’ailleurs par les agents mêmes des rites. Mais dans la plupart des cas on trouve soit dans les détails, soit dans les principes du rite

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Mais tous les rites magiques ne sont pas nécessairement illicites, ou secrets. Ainsi dans bon nombre de sociétés les rites médicaux sont évidemment magiques mais s’accomplissent fort régulièrement en public. Il est donc temps de rechercher des signes plus profonds. Nous n’en trouverions subsister par des rites une espèce d’antithèse entre le rite religieux et le rite médical et le rite magique. Dans certains cas, cette opposition s’exprime d’une façon [ill] par le murmure incompréhensible du magicien, la façon dont il marmonne des formules, ses passes, ses extases simulées ou réelles. Il y a mystère mais il n’y a pas cultes officiels. Cette remarque que nous n’avons voulu simplement rendre illustre claire par une image exemple entre mille fera mieux comprendre la nature du critère que nous proposons ici.

Le rite religieux, même facultatif, si occasionnel, si sympathique que nous puissions l’imaginer est toujours à quelque degré, officiel, et prescrit, il fait partie d’un système organisé, d’un culte. Le tribut rendu aux divinités, même à l’occasion d’un vœu, d’un sacrifice expiatoire pour cause de maladie, est un hommage régulier, obligatoire même s’il est fait d’une façon toute volontaire. Les systèmes anciens de rites religieux qui sont appelés vœux [ill], offrandes expiatoires, sont quoique facultatifs des [formes] nécessaires rendu à la divinité. Le rite magique au contraire est hors de la vie religieuse organisée. [ill]

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Il se pose une grave question, et que notre travail actuel résoudra, nous l’espérons. Celle de la parenté entre la magie et les arts techniques. Eux aussi sont du domaine de la production, les gestes en sont réputés aussi efficaces. Sans avoir à chercher bien loin nous trouvons tout un art, l’art médical par exemple, où pendant longtemps la magie a vraiment dominé. La plupart du temps, la prescription du médecin, son geste de cure, s’accompagnait [ill] de pratiques et de croyances magiques. Comment démêler ce qu’il y a de magique et ce qu’il y a d’art dans le massage des magiciens australiens, dans le bain de vapeur recommandé par le magicien iroquois, dans le formulaire pharmacologique même d’un Pline, même d’un Ambroise Paré. Pendant longtemps, l’acte médical est resté entouré de prescriptions rituelles, magiques même : les prières, les incantations, les influences astrales, les actions symboliques des choses sympathiques, homéopathiques sont [signalées ?] même par les médecins plus efficaces que ses actes et ses drogues et ses [ill]. Les notions de la force des rites et de la force des actes se mélangent, indistinctes. Nous n’avons donc pas de criterium possible si nous n’attachions pas d’autres caractéristiques aux dernières choses. Les techniques laïques, les industries qui sont, elles aussi traditionnelles, la série des gestes de l’artisan est tout aussi uniforme que la série des gestes du magicien, et lui même et les autres attribuent une véritable puissance aux actes nécessaires.

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[ill]. Il n’y a donc qu’une chose possible, c’est que les techniques magiques n’aient pas une efficacité du même genre que les techniques laïques. En effet, quand avec le couteau on séparait des chairs, on n’attribue pas à cet acte même sans connaitre les théories de la résistance des matériaux, la physiologie ou la minéralogie une autre action qu’une action mécanique. La technique laïque est une série de geste qui agissent et sont crus agir parce que les mouvements produits sont ceux qui aboutissent réellement à leurs effets. Même erroné, un art industriel, en tant qu’il est un art de la production est cru produire par voie de mouvements, dépenses de forces, instruments, mécanismes, chimismes. Quand une technique est à la fois laïque et magique, la partie magique est celle qui ne répond pas à cette définition. Ainsi une pratique médicale ou pharmaceutique ou chirurgique comporte l’emploi de mots, des incantations, des précautions rituelles, des observances [ill], c’est dans cette mesure qu’elle est magique.

C’est là que règnent forces occultes, esprits, et tout un [ill] qui fait que les mouvements, les gestes rituels sont réputés avoir une efficacité à part, sui generis, qui ne correspond pas à l’effet matériel du rite, au déplacement sensible des choses.

Nous arrivons donc à définir le rite magique un acte traditionnel d’efficacité sui generis. Mais ce faisant nous ne distinguons pas le rite magique du rite religieux. Nous définissons le rite en général puisque nous l’avons seulement opposé aux autres habitudes.

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Nous ne tenterons pas ici une définition vraiment limitative de la magie. Celle-ci ne pourrait venir utilement, démonstrativement, qu’en conclusion d’un travail sur les rapports de la magie et de la religion. D’autre part, nous ne pouvons pas nous contenter d’appeler magie ce que l’on appelle d’ordinaire de ce nom, car ce qui est magie pour les uns peut être science pour les autres, ou religion : ainsi en a-t-il été souvent de la médecine par exemple. Nous ne pouvons même pas nous contenter d’observer comme nous [ill] la règle précédente qui veut que nous n’appelions magiques que les phénomènes connus sous ce nom par les gens qui les ont pratiqués, car ces gens se sont plaints toujours de ces points de vue spéciaux, exclusivement pratiques, contingents, et [ill] pour se tromper. C’est ainsi qu’ont été qualifiés de magie par le christianisme, et même par les [ill] actuels tous les débris d’anciens cultes, même pratiqués encore suivant une forme vraiment cultuelle.

L’impossibilité ou nous sommes d’une part, et la nécessité nous incitent à donner une espèce de définition exclusivement d’indication.

Nous nous bornerons à l’examiner en les accumulant, pour ainsi dire, les divers signes auxquels on peut reconnaitre qu’un fait est magique. Naturellement ce seront des signes qui devront être employés tous [concrètement ?]. Sauf que quelques uns, qui sont de simples [succédanés ?] des autres, tous sont suffisamment essentiels et caractéristiques.

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Enfin nous nous bornerons à définir les rites magiques plus apparents que les autres. Par eux nous arriverons à définir les croyances attachées à ces rites, car une croyance magique est simplement l’envers intellectuel des rites, l’autre face. Et aussi l’agent, le magicien, qui est simplement celui qui pratique le rite.

La magie et les rites magiques sont en premier lieu des faits de tradition. Il ne viendra à l’idée de personne d’appeler magiques des actes ou des idées croyances strictement individuelles, auxquelles les autres ne croient pas, ou que personne d’autre n’a jamais pratiqué, telle une martingale de joueur, ou un scrupule de [ill] isolé.

Il n’y a magie que là où une tradition se perpétue, se communique.

Mais ces gestes traditionnels que sont les rites magiques ne sont pas des actes indifférents. Ce sont des actes importants au plus haut degré. Ils sont même dans certains cas les actes par excellence. Ils sont créateurs. Ils suscitent des choses, des évènements. Ils font

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[1Walter William Skeat (1866–1953), anthropologue, spécialiste de la Malaisie et auteur du célèbre Malay Magic Being an Introduction to the Folklore and Popular Religion of the Malay Peninsula en 1900. L’ouvrage a été lu par Mauss qui en a fait un long compte rendu dans l’Année sociologique (4, 1900, pp. 169 à 174. Texte reproduit in Marcel Mauss, Œuvres. 2. Représentations collectives et diversité des civilisations, pp. 383 à 388). L’ouvrage ayant appartenu à Mauss est disponible au Musée du Quai Branly (MH-L-A-011061). Ajoutons que c’est dans ce livre, aussi, que Mauss s’intéresse à la situation du prêtre-magicien, le pawang. Il note : « s’il est en opposition avec la religion officielle, il est, au contraire, le dépositaire, à la fois de la religion populaire et de la magie. En lui ces pouvoirs se confondent. Il peut, par lui-même, par ses rites et ses formules, par son influence sur les esprits, sur les vieux dieux malais et hindous ; il peut encore par ses formules évocatives des saints locaux, des saints de l’islam, des prophètes, d’Allah lui-même. Il préside au mariage, à la chasse, à la récolte. C’est un pawang qui est le chef des troupes d’acteurs. Par différents procédés d’origine sémitique et chinoise, peut-être européenne, il a des facultés divinatoires incomparables. Il a aussi des pouvoirs médicaux, en même temps qu’il est le maître de la magie noire. Pourtant les fonctions, même là, sont d’ordinaire divisées. C’est tel ou tel pawang qui est déposi¬taire d’une formule, d’un rite particuliers, qui est le maître d’un génie spécial. Si, par un côté, le sorcier et l’ancien prêtre se sont confondus, par un autre côté ils sont restés légèrement distincts. » On peut trouver l’ensemble du compte rendu dans le volume téléchargeable ici.

[2Ce chapitre a été conservé par Hubert dans un dossier intitulé « Existence et définition de la magie ». Œuvre conjointe de Mauss et de Hubert, le premier paragraphe a fait l’objet de plusieurs coupes. Voici la transcription des notes rassemblées dans ce dossier :

Mauss JPEG Loic Hamon © Musée d’Archéologie nationale – Domaine national de Saint-Germain-en-Laye « Il est évident qu’il existe autour de nous, à titre de survivance, tout au moins, une notion de magie. Nous la trouvons toute faite. Elle est attestée par le langage commun.Hubert En général on donne l’épithète de magique à tout ce qui paraît extraordinaire et surnaturel. D’autre part le langage paraît désigne d’une façon qui n’est pas toujours précise mais le plus souvent sans précision par le mot de magie un ordre système de choses (nous employons à dessein le mot le plus vague) qui se présentent en dehors des systèmes religieux, qui les côtoient mais qui reçoivent d’eux une [ill] //
3) aux pratiques magiques correspondent un certain nombre des croyances qui dans les sociétés dont l’organisme est très différencié sont qualifiés de superstitions qui sont pour la plupart qualifiées de superstitions.
Superstitions et magie, Aberglaube et Zauberei sont des mots qu’on associe volontiers. Les superstitions ne se distinguent des autres croyances qu’en ceci qu’elles ne sont pas enregistrées par les dogmes des religions [ill] invérifiés par les sciences positives. Superstitions et magie, aberglaube et Zauberei sont des mots qu’on associe qui s’appellent mais on hésite à les faire coïncider entièrement. Le mot superstitions évoque l’idée de la magie populaire, celle des campagnes, mais non pas celle de la sorcellerie, nous avons l’idée d’une magie savante utilisant des connaissances secrètes et des forces obscures, vivant dans // 4) un monde intermédiaire entre la réalité et l’illusion. La croyance à l’existence de la magie et aux pouvoirs magiques n’est pas qualifiée de superstitions, au moins généralement dans les cercles religieux et l’on pense que la magie procède de croyances qui ne sont pas nécessairement superstitieuses. // 6) Telle est à peu près, aussi vaguement définie qu’elle se présente en général, la notion usuelle de magie. Il est inutile de comparer systématiquement le sens du mot français à celui de ces équivalents européens, magie, Witchcraft, Zauberei, etc… Quelles que soient les raisons locales d’étendre ou de restreindre le sens des mots, les communications des [littératures ?] sont telles que des sens communs finissent toujours par s’établir. Les différences ne sont à considérer que pour les origines.
Si nous étendons plus loin la comparaison, nous sommes en présence de deux cas. 1. Il n’y a pas de terme général équivalent à notre terme magie, mais une série de termes spéciaux. 2. Il y a des suivants qu’il y a ou qu’il n’y a pas de termes généraux qui valent à notre terme magie. Nous // (suite manquante)

JPEG Loic Hamon © Musée d’Archéologie nationale – Domaine national de Saint-Germain-en-Laye Mais le fait que nous trouvions seulement une notion de magie est sans importance car elle est chez nous à peu près vide de contenu réel. L’étude des civilisations plus anciennes ou moins avancées que la notre sera seule démonstrative. Notons seulement que nous ne trouverons pas pourtant un terme général ou même une série de termes spéciaux qui désignent le total de ce que nous appelleront la magie. Nous devons recourir à d’autres indices.

MaussLes sociétés se sont faites de la magie une espèce d’image, de mythe, l’ont qualifié juridiquement, moralement, religieusement.

HubertNous tirerons de ces qualifications une preuve de l’existence de la magie et les éléments d’une définition. // (suite manquante)

Mauss(…) il résulte que la magie a été conçue distinguée, dans les diverses sociétés, des autres systèmes de faits sociaux. Par conséquent il y a lieu de croire qu’elle est susceptible d’une définition. Mais nous savons aussi que les sociétés n’en ont pas toujours eu une idée conscience très claire et que quand elles l’ont eut elles n’y sont arrivées que lentement, avec bien des hésitations. Nous ne pouvons donc espérer trouver tout de suite une définition parfaite, qui ne pourrait venir qu’en conclusion d’un travail sur les rapports de la magie et de la religion.
Cette définition nous devons la faire pour notre compte car nous ne pouvons nous contenter d’appeler magiques les choses qui ont été appelés ainsi par leurs auteurs, ceux-ci se plaçaient à des points de vue subjectifs personnelles pratiques qui ne sont pas nécessairement les points de vue de la science. Ainsi, une religion appelle magique les restes d’anciens cultes avant que ceux-ci aient cessé d’être pratiqués religieusement. Cette Erreur qui s’est déjà propagé dans la science puisque les folkloristes considèrent comme magiques les anciens rites agraires (cf Skeat). Quand à nous nous considérons comme magiques par rapport à une société particulière que les choses qui ont été vraiment telles et non pas celles qui ont été ainsi qualifiés dans l’opinion d’une fraction quelconque de la société.// La magie comprenant des agents, des actes et de la croyance des représentations, nous appelons magiciens l’individu qui accomplit les actes magiques, même quand il n’est pas un professionnel.Non attribué

[3Dans le manuscrit, « strictement individuel » a été barré.

[4Cette question a été abordé par Mauss dans son commentaire de l’œuvre de Steinmetz, publié en 1896, dans la Revue de l’histoire des religions : « La religion et les origines du droit pénal d’après un livre récent. » n˚ 34, (I : Étude analytique : pp. 269 à 295) et n˚ 35 (II : Étude critique : pp. 31 à 60). Texte reproduit in Marcel Mauss, Œuvres. 2. Représentations collectives et diversité des civilisations (pp. 651 à 698).

[5Dans le manuscrit, « précautions » a été barré.

[6La notion de sympathie magique apparait dans la première édition en deux volumes du Golden Bough de 1890, pp. 10-11. Frazer la développe fortement dans la deuxième édition (en trois volumes, 1900), I, pp. 9-10, 49-78.

[7Souccot, qui signifie « cabanes » (parfois traduit par « tabernacles »), est la troisième fête de pèlerinage prescrite par la Torah. Cette fête est à la fois historique car elle célèbre la protection que Dieu accorda aux Hébreux dans le désert, mais aussi agricole en commémorant les vendanges et les engrangements.

[8Cette phrase, écrite dans le manuscrit, a été coupé dans la version publiée : « Mais si dans bien des cas de pareils signes peuvent suffire en effet, il est extrêmement dangereux de s’en servir ».

[9 JPEG © Muséum national d’histoire naturelle (Paris) – Direction des bibliothèques et de la documentation Sur l’action directe, immédiate de la magie, on peut renvoyer le lecteur à cette fiche d’Hubert dans laquelle il schématise les différents procédés de la magie.

[10La suite de la phrase a été barré dans le manuscrit : « la question est donc complexe est plus délicate que M. F. ne l’a entrevu. (...) »

[11Ils sont magiques et non religieux parce que selon Frazer ils ne font pas intervenir d’êtres personnels. Frazer suit donc la définition minimale de la religion donnée par Edward Tylor, c’est-à-dire « la croyance en des êtres spirituels ».

[12« Totémiques » a été barré dans le manuscrit.

[13La cérémonie de l’Intichiuma a fait l’objet de plusieurs commentaires dans l’œuvre de Mauss. Dans un premier temps, pour sa thèse sur la prière, il suit les observations faites par Spencer et Gillen. Au début des années 1920, dans son séminaire de l’EPHE, il va relativiser le point de vue de Durkheim sur l’effet principal de ce rituel où la société prend conscience d’elle-même. En effet, pour Mauss, cette cérémonie a des significations différentes selon sa localisation dans le monde australien. Il va à partir de là chercher à creuser la notion d’effervescence et chercher à prendre en compte la question de la musique, du souffle, des attitudes stylisées, des mouvements de danse, effectués lors de cette cérémonie.

[14Ce passage a été barré dans le manuscrit : « Il y a continuité entre la magie et la religion »

[15Il nous a été impossible de retrouver la référence de cette citation. On notera que dans le chapitre consacré à la magie dans sa Deutsche Mythologie, Jacob Grimm propose une définition proche de celle de Hubert et Mauss, construite sur l’opposition entre le licite et l’illicite (Voir Jacob Grimm, Teutonic Mythology, trad. James Stallybrass, 4e éd., Londres, Bell and Sons, 1883, p. 1031).

[16La suite de la phrase a été barré dans le manuscrit : « Le rite magique est en principe étranger à la vie religieuse organisée, au culte que la religion est destinée à accomplir. Et c’est là son [originalité ?] selon nous. Mais contentons nous de ces indications provisoires que nous aurons à démontrer un jour quand nous aurons à analyser les rapports de la magie et de la religion ».