Aube, d’Antoine Poncet
L’histoire de la sculpture d’Antoine Poncet est liée à la Société Académique Vaudoise (SAV), trait d’union entre le canton de Vaud et l’Université. Elle soutient entre-autre des recherches académiques par des bourses et s’inscrit aussi dans le panorama culturel en fournissant des subsides à la création artistique. L’acquisition d’œuvres d’art par cette institution ne semble, a priori, pas faire partie de ses objectifs. Mais, pour célébrer son 100e anniversaire, la SAV commande (ou achète peut-être, si l’on en croit la date de réalisation antérieure de l’œuvre) à l’artiste une sculpture qui reflète sa perspective d’avenir, en vue de l’offrir à l’Université, qui l’inaugure, en mai 1990.
Les 100 ans de la Société Académique Vaudoise symbolisé par une sculpture
Au lendemain des festivités, un article paru dans la Nouvelle Revue de Lausanne (12.05.1990) recueille les propos de l’ancien-recteur de l’Université, André Délessert – sculpteur lui-même, dont l’esthétique est proche de celle d’Antoine Poncet -, membre de la SAV, qui aperçoit dans la sculpture l’expression d’une harmonie et l’unification du savoir dispensé par l’UNIL. Cette vision est soutenue par l’artiste lui-même qui voit dans son aube, l’espoir d’un futur heureux. Le choix de symboliser son avenir à travers une œuvre d’Antoine Poncet, permet à la SAV d’affirmer davantage sa confiance et, grâce au titre de l’œuvre, sa perspective de nouveautés pour les années à venir.
Car en effet, cette notion d’harmonie et d’espoir se retrouvent dans l’ensemble de la production sculpturale d’Antoine Poncet. L’artiste, né en 1928, originaire de Genève et petit-fils du peintre Maurice Denis, vit aujourd’hui entre Paris et Carrare. C’est dans la capitale française qu’en 1947, il rencontre les sculpteurs Jean Arp et Brancusi. Cela l’amène à s’éloigner d’une production sculpturale figurative pour élargir sa vision de l’art et son appréhension du volume. Depuis, l’artiste relève plusieurs fois sa volonté de rendre aux sculptures leur part de rêve et de spiritualité, s’éloignant ainsi de toute représentation à caractère dramatique. Ses interventions dans le milieu universitaire sont multiples, on retrouve notamment des œuvres monumentales à la Northwestern University et à la Stanford University de New-York.
Avec le temps, le bronze de Dorigny ne semble plus si lisse, diverses marques viennent maintenant en perturber le volume. Bien qu’il ne puisse maîtriser l’évolution de la sculpture une fois terminée et placée dans un espace public, Antoine Poncet accorde un intérêt fondamental au travail de la matière. Dans sa jeunesse, l’artiste découvre le marbre de Carrare et grâce à lui, se rend compte de l’infinité des possibilités qu’offrent les matériaux, qu’il décide de mettre au centre de son travail. Pierres ou métaux sont polis d’une façon similaire pour chercher à ce que la surface reflète au mieux la lumière, le titre de l’œuvre témoigne également de l’importance que ce dernier élément peut avoir.
Le changement de lumière permet à l’œuvre de se renouveler sans cesse à l’œil du spectateur. Ce dynamisme est renforcé par l’agencement des volumes qu’a construit Antoine Poncet, en proposant d’ailleurs de tourner autour de l’objet, ou de le faire tourner. La sculpture se réinvente selon l’angle d’approche de l’observateur, elle peut s’appréhender sous une multiplicité de points de vue qui s’articulent autour de la percée centrale de laquelle se déploient ensuite les formes qui se séparent et se fondent en des masses courbées, creusées et étirées à la fois, mais qui gardent, à chaque fois, ce même équilibre et cette même justesse chères à l’artiste.
Lorena Ehrbar, assistante-étudiante en archives