Rencontre de l’Anthropole et de l’Internef

Fontaine de Pierre Ouvelay, © Uniris – UNIL

Fontaine de Pierre Oulevay

La fontaine de bronze et de granit, pivot entre l’Anthropole et l’Internef, a été réalisée en 1993 par Pierre Oulevay et financée par le fameux pourcent culturel, suite à un concours restreint organisé par l’UNIL. Trois autres projets – des artistes Yves Dana, Gaspard Delachaux et Etienne Krähenbühl – ont été proposés au jury, composé par le Comité directeur du BUD, Guido Cocchi, Jean-Paul Dépraz, et le Rectorat. Sans titre, Pierre Oulevay explique que son œuvre aurait pu s’appeler « Rencontre » ou « Trait d’union », le jury l’a choisie presque à l’unanimité, son projet semblait être le plus adapté à l’échelle du lieu et présentait, d’après eux, une plus grande puissance d’expression que ceux des concurrents.

La sculpture monumentale et sa réalisation via des concours n’est pas inconnue à Pierre Oulevay, qui, né en 1944 à Yverdon-les-bains et formé à Vevey à l’Ecole des Arts et Métiers, a été primé à de nombreuses reprises pour la réalisation d’œuvres publiques (des bas-reliefs, notamment au CHUV à Lausanne, des fontaines à Cossonay et Morges, et des sculptures dans différentes communes suisses). Ses œuvres sont également exposées à la Fondation Pierre Gianadda, à Nyon, Lausanne, Paris et Lyon. En peinture et en dessin, il suggère des formes organiques, humaines et végétales, mais toujours explique-t-il, par une approche de sculpteur: un geste libre, mais un trait appuyé, franc, qui rend compte de la matière, organique, du fusain.

Pour imager la réunion des deux bâtiments (anciennement BFSH 1 et 2), Pierre Oulevay propose la rencontre de deux éléments monumentaux en bronze émergeant du sol. Les bras sont en porte-à-faux au-dessus du bassin d’eau qui s’écoule sur deux pans en granit rose, inclinés sur plusieurs mètres. Ici, comme dans d’autres œuvres de Pierre Oulevay, nous retrouvons la volonté de créer un contraste entre un sentiment de solidité, d’ancrage et celui de légèreté, traduit à Dorigny par l’eau qui ruisselle en un film très fin. La fontaine de Cossonay, réalisée en 1989 est aussi composée de structures en pente, mais elles sont moins linéaires et scandent ainsi l’écoulement de l’eau.

La construction d’une telle œuvre se fait en plusieurs étapes et demande l’intervention de différents corps de métiers qui permettent à l’idée de l’artiste de se matérialiser. Après la validation de la maquette par le jury, Pierre Oulevay construit le squelette des éléments en bronze par l’assemblage de 300 tubes qu’il recouvre de plâtre. Découpés ensuite en 11 parties différentes, ces morceaux sont coulés en bronze (il en faudra 4 tonnes) à la fonderie Gilles Petit avec laquelle il collabore depuis 1979. Après les avoir assemblées, l’artiste se charge de la patine sur l’ensemble des éléments. Pour révéler au mieux cette matière, l’artiste choisit un granit aux teintes ocres et roses. Vient alors le temps de son acheminement de l’Inde via Carrare, de sa découpe, du travail des ingénieurs qui se chargent du circuit d’eau et de l’installation de l’œuvre à son emplacement final.

Dans la réflexion qui accompagne sa création artistique, Pierre Oulevay explique sa volonté de traduire la vie et le mouvement dans ses œuvres, son travail sur la pierre aussi, qu’il considère comme une écriture ; la sculpture comme un langage, une traduction en relief des émotions, le pouvoir de transposer des sensations en matière.

Lorena Ehrbar, assistante-étudiante en archives