De 1970 à 2010

Nous sommes les meilleurs, mais personne ne le sait.

Telle était à peu près la devise du Rectorat à la veille du 450e anniversaire de l’Université de Lausanne. Le nombre de mentions de l’Université (on ne parlait guère alors de l’UNIL) dans la presse était plus que modeste et les journalistes n’y étaient pas toujours les bienvenus.

Les célébrations du 450e anniversaire (1987) conduisirent le Rectorat à modifier de fond en comble son attitude et à muliplier les contacts avec les medias. Des démarches auprès du groupe de presse dominant à l’époque, 24 Heures et Le Matin, permirent des ouvertures de ce côté. Le Journal de Genève et la Gazette de Lausanne étaient acquis à la cause. La radio, la télévision étaient présents, mais moins influents qu’aujourd’hui. Et, faut-il le rappeler, Internet n’existait pas encore.

UniLausanne: 1971-1994, 79 numéros publiés

« L’Université de Lausanne ne se connaît pas elle-même, et l’opinion publique ne connaît pas l’Université », écrivait le Rectorat dans l’éditorial qu’il signait pour le premier numéro du périodique UniLausanne, daté de novembre 1971. En 1968 (la date ne doit rien au hasard), le Rectorat demande à l’Etat la création d’un Service de l’information de l’Université. Ce Service est créé deux ans plus tard, en 1970.

La mission première du Service, poursuit le Rectorat, est de publier un périodique à l’intention non seulement des membres de la communauté universitaire, mais aussi de tous ceux qui, à l’extérieur, devraient s’intéresser à l’Université.

Décédé prématurément, Marcel A. Matthey, premier chef du Service de l’information, a pour successeur en 1978 Axel Broquet. Ce dernier dirigera le service jusqu’à sa retraite, légèrement anticipée, en novembre 2007. Le service change plusieurs fois de nom: par adjonction de la lettre P, il évolue en SPIUL, enfin en SPUL ou Service de presse de l’Université de Lausanne. Il devient bientôt un organe essentiel de la stratégie de communication du Rectorat, jusqu’à son rattachement à Unicom en avril 2004.

Naissance d’Allez savoir !

Le magazine UniLausanne, initialement composé sur machine à écrire électrique et pauvre en illustrations, se professionnalise et s’enrichit, grâce à l’arrivée de journalistes RP, tout en restant d’un abord austère et d’une audience limitée. En 1993, le coup de grâce est donné à UniLausanne par le Conseil d’Etat au nom du programme d’économies « Orchidée ». La suppression de son organe laisse l’Université de Lausanne « sans voix ». Mais elle saura rebondir rapidement.

Dès juin 1994, le magazine Allez savoir ! prend le relai, grâce à la générosité de la Société académique vaudoise, qui se substitue à l’Etat pour le financement du numéro zéro du nouvel organe de l’UNIL. Publié depuis 1995 trois fois par an selon une formule créée par son rédacteur en chef, Jocelyn Rochat, ancien collaborateur du SPUL et journaliste professionnel au long cours, le nouvel périodique de l’Université dépasse le tirage de 20’000 exemplaires par numéro et connaît depuis quinze ans un succès qui ne se dément pas.

Au cours des années, le SPIUL/SPUL a été investi de nombreuses responsabilités, parmi lesquelles l’édition de la Collection des publications de l’Université de Lausanne, qui réunit notamment les discours du Dies Academicus et divers autres ouvrages. A partir d’avril 1988, l’une des tâches principales du SPUL consiste à faire paraître l’hebdomadaire gratuit Uniscope, le « canard » de l’Université de Lausanne, qui offre des articles de fond, un mémento et des informations de caractère général. L’édition d’Uniscope se poursuit à ce jour, mais sous une forme mensuelle et enrichie.

Publié sous la direction d’Axel Broquet de 1988 à 2007, Uniscope doit beaucoup à Francine Crettaz, la collaboratrice engagée par le Rectorat dès 1985 pour assurer la communication liée à la célébration du 450e anniversaire de l’Université. Le SPUL a compté au nombre de ses collaborateurs plusieurs jeunes licenciés qui sont devenus au cours des années des journalistes connus des medias romands : presse quotidienne, hebdomadaire, radio et télévision. Ces jeunes gens, hommes et femmes, étaient placés sous la houlette de personnalités comme Philippe Barraud ou Laurent Bonnard, appelés en renfort comme conseillers et formateurs. Le passage à la rédaction d’Uniscope compta longtemps comme « stage libre ».

Le 450e anniversaire de l’Université : une chance unique pour la communication

Dès 1983, le Rectorat se met à réfléchir à la meilleure manière d’utiliser le 450e anniversaire de la création de l’Académie de Lausanne en 1537 pour concevoir et transmettre un certain nombre d’informations ou de messages. Le premier d’entre eux porte sur la métamorphose dont le public n’est pas encore conscient, la transformation de l’Université, petite institution médiévale blottie au pied de la cathédrale, en un centre de formation supérieure et de recherche moderne situé hors de la ville. Le changement est symbolisé par la construction par étapes des bâtiments de Dorigny, dont les derniers nés sont le Bâtiment du rectorat et de l’administration, Unicentre (1981), le Bâtiment central avec les restaurants et la bibliothèque (1982), le Bâtiment de biologie, Biophore (1982) et l’édifice inauguré précisément en 1987, le Bâtiment des Facultés des sciences humaines II ou BFSH 2 (Anthropole). Le plan de ce dernier est reproduit sur le logo créé par l’Atelier Pierre Bataillard à l’occasion du 450e anniversaire, à côté des édifices de l’Ancienne Académie, à la Cité.

Aux commentaires sur le tranfert de l’Université à Dorigny vient s’ajouter un second message, formulé au sein du Comité créé pour lancer une vaste récolte de fonds : l’ouverture sur la cité, avec en appui le slogan : « Devenez partenaires de l’Université de Lausanne ». Les membres du Comité, personnalités en vue du canton de Vaud et de Suisse, parcourent villes et campagnes, petites, moyennes et grandes entreprises, pour les informer de la transformation, de la volonté d’ouverture et des besoins financiers de la vénérable université vaudoise. Le but fixé, dix millions de francs, n’est pas atteint alors, mais le capital de dotation de la Fondation du 450e anniversaire, un peu plus de quatre millions de francs au départ, atteint aujourd’hui le double. Ses revenus sont affectés aux buts intialement fixés dans les statuts : l’appui à la relève, les échanges internationaux, l’organisation de colloques scientifiques et le soutien aux publications de l’Université.

C’est en 1987-1988 que l’Université de Lausanne est successivement hôte d’honneur de la Foire aux échantillons de Bâle, du Comptoir suisse, enfin du Comptoir du Valais à Martigny. Le SPUL joue un rôle important dans ces campagnes de promotion.

Un exemple de communication réussie : le « dossier Mussolini »

L’« affaire Mussolini » remonte au 400e anniversaire de l’Université, en 1937. L’Université de Lausanne s’était alors fait remarquer par le doctorat honoris causa qu’elle décerna à Benito Mussolini, son « ancient étudiant ». Sur le moment, l’affaire avait fait grand bruit et créé un malaise au sein même de l’institution. A l’approche du 450e anniversaire, l’émotion se fait à nouveau perceptible. Certains vont même jusqu’à préconiser le retrait du diplôme à titre rétroactif. La nervosité se cristallise autour d’un dossier, mystérieusement disparu et qui contiendrait des pièces compromettantes.

Au début de 1987, on craint que des incidents ne viennent perturber le déroulement harmonieux du 450e anniversaire et des manifestations qui lui sont attachées. De manière théâtrale, le professeur à qui le Rectorat avait confié pour étude dans les années soixante le « dossier Mussolini » rapporte le dossier « disparu ». Qu’en faire ? Ici encore, les conseils de Francine Crettaz sont précieux : loin de chercher à occulter une page peu glorieuse de l’histoire de l’Université de Lausanne, le Rectorat décide de rendre public l’ensemble des pièces du « dossier Mussolini » en sa possession sous la forme d’un « livre blanc », qui prend la forme d’un numéro spécial d’UniLausanne.

Mais, à mesure que progresse l’enquête du jeune historien chargé de cette publication, Olivier Robert, des documents nouveaux, extérieurs à ceux que possède l’Université, s’accumulent. En fin de compte, à côté du « livre blanc », l’Université publie un volume intitulé Matériaux pour servir à l’histoire du doctorat H. C. décerné à Benito Mussolini en 1937, Etudes et documents pour servir à l’histoire de l’Université de Lausanne, 26 (1987), 245 p. in quarto. Une conférence de presse pour présenter le volume, des interventions à la radio et à la télévision provoquent quelques articles et réactions, la plupart favorables. Le volume, imprimé à 2000 exemplaires, suscite un intérêt poli et constitue un « flop » commercial. L’« affaire Musolini » est close, la collation d’un doctorat honoris causa au dictateur italien en 1937 ne soulève plus les passions, mais tout au plus la curiosité des historiens.

L’après 450e anniversaire

Les suites directes du 450e anniversaire sont perceptibles aujourd’hui encore, dans la mesure où le grand effort de mémoire effectué à cette occasion a laissé des traces. L’Université a publié en effet de 1987 à nos jours une série de monographies incluant des ouvrages généraux sur l’Université de Lausanne, dont le livre d’André Delessert, L’Université au défi (1987) et un Annuaire des professeurs (2000) ainsi que de nombreuses études ponctuelles, historiques, économiques et sociologiques, parues dans la série des Etudes et documents pour servir à l’histoire de l’Université de Lausanne.

Le rajeunissement de l’image passe aussi par l’introduction au début de 1989 d’un nouveau logo, en remplacement du sceau portant au centre l’image du Christ, emprunté à la cathédrale de Lausanne, et d’une inscription latine. Le nouveau logo, dû, comme celui du 450e anniversaire, à l’Atelier Pierre Bataillard, rappelle le rattachement de l’Université à sa ville par une allusion à la cathédrale, tout en s’appuyant sur un graphisme contemporain. La couleur du clocher de la cathédrale de Lausanne, dans un vert un peu plus sombre et un peu plus bleu que celui du drapeau vaudois, souligne l’appartenance cantonale de l’Université de Lausanne. Ce logo est resté en vigueur jusqu’en 2005, date où il a été remplacé par les lettres Unil en cursive dans une couleur bleu cyan.

En guise d’épilogue

Citons pour conclure un commentaire de Justin Favrod, docteur de l’UNIL, ancien assistant d’histoire ancienne, paru dans 24 Heures du 21 juin 2010, p. 23 :

Malgré diverses tentatives (cours publics, les Mystères de l’UNIL), l’Université reste très à l’écart de la cité. La distance pour relier la haute école à la société s’avère difficile à parcourir.

Les pages qui précèdent montrent que depuis plus de 40 ans, l’Université de Lausanne fait de son mieux pour se faire connaître et se rapprocher de la cité. Le diagnostic proposé par Justin Favrod indique que les efforts consentis jusqu’ici pour la communication doivent se poursuivre et s’intensifier.

Pierre Ducrey, professeur honoraire,
recteur de l’Université de Lausannne 1987-2005

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